L’article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés
de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent
tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix,
s’il les avait connus.
Cette garantie a pour finalité de permettre à l’acquéreur lésé d’obtenir la résolution de la vente et
remboursement total du prix de vente ou l’obtention d’une indemnisation en cas de dommage.
L’application de cette garantie implique la réunion de 3 conditions cumulatives, à savoir :
- Le défaut dénoncé doit être caché, c’est-à-dire non apparent lors de l’achat ;
- Le défaut doit rendre le bien inutilisable ou diminuer très fortement son usage
- Le défaut doit exister au moment de l’achat.
Cette action doit toutefois être engagée dans des délais stricts sous peine d’irrecevabilité de la
demande.
Le premier délai auquel il convient de se référer correspond à la prescription spéciale de deux ans
prévue à l’article 1648 du code civil.
En effet, ce texte dispose que l’action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par
l’acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice, date correspondant le plus
souvent au jour du dépôt du rapport d’expertise. (Civ. 3 ème , 11 juin 2014, n°13-11786)
Toutefois, ce délai n’est pas le seul à encadrer l’action en garantie des vices cachés puisque, depuis le
début des années 2000, les juridictions retiennent que cette action est également enfermée dans le
délai de prescription de droit commun courant à compter de la vente.
En matière civile, la prescription extinctive de droit commun était initialement d’une durée de trente
ans (ancien article 2262 du code civil). Lorsqu’une partie était commerçante, le délai était de dix ans
(article L.110-4, I, du code de commerce).
La loi du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription, a néanmoins réduit notablement la durée
de la prescription, tant en matière civile qu’en matière commerciale, en fixant dans les deux cas sa
durée à cinq ans conformément aux dispositions de l’article 2224 du code civil.
Aussi, suite à cette réforme, les juridictions ont adopté un système de prescription reposant sur un
double délai, à savoir un délai de deux ans à compter de la découverte du vice, délai étant lui-même
enchâssé dans un délai de 5 ans à compter de la date de la conclusion de la vente.
Ces délais d’action apparaissent néanmoins préjudiciables pour les acquéreurs lésés qui découvrent,
les plus souvent six ou sept ans après l’achat de leur véhicule neuf, que celui-ci était affecté d’un
grave vice de conception les privant ainsi de tout recours contre le constructeur automobile même
s’ils agissent rapidement et bien avant la fin du délai de deux ans visés à l’article 1648 du code civil.
Du reste, la possibilité pour l’ancien propriétaire de se retourner contre son propre vendeur, ou
constructeur automobile, après avoir indemniser son acheteur est aujourd’hui particulièrement
restreint, et même impossible si son propre achat remonte à plus de cinq ans.
Néanmoins, depuis la fin de l’année 2021, une partie de la jurisprudence semble prendre acte des
lacunes du système actuel avec l’apparition d’une position dissidente menée par la 3 ème Chambre
Civile de la Cour de cassation, position préférant au délai de 5 ans prévu par l’article 2224 du code
civil, celui de 20 ans prévu par les dispositions de l’article 2232 du même code. (Civ. 3 ème , 8 décembre
2021, n°20-21439)
Suite à l’arrêt précité, plusieurs juridictions ont décidé de s’aligner sur cette nouvelle jurisprudence
combien même que cette interprétation demeure isolée face à la position de la 1 ère Chambre Civile et
de la Chambre Commerciale. (CA RENNES, 4 ème ch., 28 avril 2022, n°21/01716 ; CA PAU, 1 ère ch., 7
septembre 2021, n°19/02761 ; CA REIMS, 1 ère Ch. section civ. 13 septembre 2022 ; CA LYON, 6 ème
chambre, 8 septembre 2022, n°2108860)
Aussi, comme l’a très récemment souligné la Cour d’Appel d’ANGERS, il existe une réelle incertitude
quant aux délais de prescription de l’action en garantie des vices cachés résultant du dédoublement
du délai de 2 ans de l’article 1648 du Code civil par un délai pouvant être présenté comme butoir ou
parfois dit de garantie, incertitude qu’il convient de prendre en considération notamment dans le
cadre du prononcé de mesure d’expertise judiciaire. (CA ANGERS, Ch. A Civile, 7 mars 2023,
n°22/00652)
En raison des incertitudes précitées et en l’absence d’un alignement de la 1 ère chambre sur la
troisième, il convient d’être particulièrement prudent quant à la question de la prescription de
l’action de la garantie des vices cachés et scruter la prochaine harmonisation qui devrait être opérée
très prochainement par la Cour de Cassation dans un arrêt de Chambre mixte.